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Francesca Mantovani

Les beaux jours de Jonathan Coe

Jonathan Coe et ses invités
Grand entretien animé par Yann Nicol

Chaque nouveau livre publié par Jonathan Coe provoque désormais une attente jubilatoire. C’est que le romancier d’outre-Manche s’est fait le brillant ausculteur d’une société britannique dont il dresse le portrait avec une acuité mordante, une belle dose d’humour et une certaine mélancolie. «Ce que signifie être anglais est devenu une obsession pour moi », explique l’écrivain à qui l’on doit notamment Testament à l’anglaise, La Maison du sommeil, Bienvenue au club, Le Cercle fermé, Expo 58, Numéro 11… Il y déploie un art du récit et une fausse légèreté, qui lui permettent souvent de convoquer les mêmes personnages d’un livre à l’autre, eux-mêmes subissant le passage du temps… Son avant-dernier roman, Le Cœur de l’Angleterre, en partie rédigé à Marseille où il était en résidence à La Marelle, nous plongeait avec malice dans les arcanes du Brexit et ses conséquences sur les individus tout autant que sur les sphères politiques et publiques. Il y questionnait aussi les maux communs à toutes les nations européennes : montée du nationalisme, crispations identitaires, political correctness…
Mais Jonathan Coe ne souhaite surtout pas qu’on le réduise à l’image de l’« écrivain anglais » du moment et puisque nous lui offrons cette carte blanche, il souhaite aborder bien d’autres sujets. Comme le cinéma, sa passion depuis toujours (il est notamment l’auteur de biographies sur James Stewart et Humphrey Bogart) qu’il met à l’honneur dans son dernier roman paru cette année, Billy Wilder et moi, où l’on retrouve le grand cinéaste américain, génial réalisateur de Sunset Boulevard ou de Certains l’aime chaud, à un moment où sonne le glas de l’âge d’or de la comédie hollywoodienne. Ou comme la musique qui est essentielle dans sa vie (il a fait partie de plusieurs groupes, dont un orchestre de cabaret féministe pour lequel il écrit des chansons et joue du piano !).

À ses côtés, dans la cour de la Vieille Charité, la comédienne Marie-Christine Barrault – dont le cinéphile Jonathan Coe ne peut ignorer qu’elle a joué au cinéma chez Rohmer ou Woody Allen – lira des extraits des textes du romancier et viendra lui exprimer son admiration. Il sera aussi question de l’élégance de la langue avec ses traductrices littéraires, Josée Kamoun et Marguerite Capelle, de l’adaptation au cinéma de La Vie très privée de Mr Sim avec le regretté Jean-Pierre Bacri et aussi de son lien à Marseille, ville qu’il dit apprécier particulièrement.

Une rencontre post-Brexit pour dire à l’Angleterre que nous l’aimons encore, ainsi que sa littérature !


À lire

  • Jonathan Coe, Billy Wilder et moi, Gallimard, 2021.

En coréalisation avec la Ville de Marseille — Musées de Marseille.

Hannah Assouline

Les beaux jours de Valérie Zenatti

Avec Valérie Zenatti
Entretien animé par Olivia Gesbert

Écrivaine, traductrice, scénariste, Valérie Zenatti possède à l’évidence toutes les qualités pour se prêter à l’exercice du grand entretien façon Oh les beaux jours !. Alors que reparaît son premier roman, En retard pour la guerre, elle reviendra sur son parcours riche et éclectique qui a démarré avec l’écriture d’ouvrages pour la jeunesse, notamment Une bouteille dans la mer de Gaza (L’École des loisirs, 2005) pour lequel elle a remporté une vingtaine de prix, qui a été traduit dans une quinzaine de langues et adapté au cinéma par ses soins et par le réalisateur Thierry Binisti.

L’œuvre de Valérie Zenatti est marquée par l’enfance, ses possibles et ses peurs, par la guerre, la dimension géopolitique des conflits, mais aussi par la place qu’occupent l’individu et son histoire intime dans la sphère collective. C’est ainsi que dans Jacob, Jacob (L’Olivier, 2014 ; prix du Livre Inter) elle a exploré la mémoire algérienne de sa famille à travers le portrait de Jacob, jeune juif de Constantine enrôlé en 1944 pour libérer la France de l’occupation nazie.
Valérie Zenatti est aussi une grande traductrice de l’hébreu, particulièrement de l’œuvre d’un des plus importants écrivains de notre temps, l’écrivain israélien Aharon Appelfeld (disparu en janvier 2018). Elle a relaté leur relation littéraire et amicale extrêmement forte dans un récit intimiste, Mensonges (L’Olivier, 2011), mais aussi dans un essai brillant, Dans le faisceau des vivants (L’Olivier, 2019).

Depuis peu, Valérie Zenatti a élargi sa palette avec l’écriture de séries. Au Mucem, elle évoquera tout cela mais aussi son goût des autres, sa passion pour la musique et pour les langues. À ses côtés, la comédienne Agathe Bonitzer, qui interprétait le personnage principal d’Une Bouteille à la mer, et l’écrivaine Nathalie Kuperman dont elle dit qu’elle est la personne au monde avec laquelle elle a « le plus de bonheur à ne pas être d’accord…».
Accords et dissonances : oh le beau programme !

 


À lire :

  • Valérie Zenatti, En retard pour la guerre, L’Olivier, 2021 ; Dans le faisceau des vivants, L’Olivier, 2019 (prix France Télévisions).

À voir :

  • Thierry Binisti, Une bouteille à la mer, Diaphana, 2019.

En coréalisation avec le Mucem.

Robbie Lee

Les beaux jours de Nancy Huston

Avec Nancy Huston et ses invités
Grand entretien animé par Olivia Gesbert

Née à Calgary, Nancy Huston a grandi au Canada anglophone. Elle en garde des souvenirs forts qui parcourent son œuvre protéiforme et riche, romans, nouvelles, essais, théâtre, correspondances, livres pour la jeunesse mais aussi dialogues entre ses textes et des photographies, des dessins ou des peintures. Parmi ses souvenirs, celui, fondateur, de sa mère qui décide de quitter le foyer familial et ses trois enfants pour poursuivre ses études aux États-Unis. À cette mère absente, la petite fille écrit des lettres, s’interroge sur les raisons de ce départ qui forment autant de scénarios intérieurs et vont faire d’elle une romancière précoce.

Installée en France à l’âge de 20 ans, Nancy Huston découvre une autre culture et les combats féministes, cause pour laquelle elle continue aujourd’hui de prendre position en souhaitant que le féminisme ne se limite pas à la sphère sexuelle mais dénonce aussi les « valeurs viriles qui gouvernent la planète », conduisant à la guerre et aux violences physiques. L’écologie, les rapports entre pays riches et pauvres sont aujourd’hui au centre de son travail, comme dans son dernier roman, Arbre de l’oubli, un grand livre sur la quête des origines à travers une famille américaine observée sur trois générations. Une jeune femme, Shayna Rabenstein, née d’une procréation pour autrui, avec un père originaire d’une famille juive de Tchécoslovaquie installée dans le Bronx et une mère issue d’une famille bourgeoise protestante du New Hampshire, décide de partir sur les traces de sa mère biologique, afroaméricaine. Elle se rend à Ouagadougou, portant en elle toutes les questions et les contradictions de notre temps – genre, féminisme, procréation, laïcité… – que ce beau roman parvient à embrasser.

Au cours de ce grand entretien, Nancy Huston nous emmènera aussi en Haïti, pays dont la culture et les rites la fascinent, avec la présence à ses côtés de Jean-Marie Théodat ; on la suivra aussi à Paris dans les ateliers musique et poésie qu’elle mène passionnément. Car la musique est aussi l’une des grandes affaires de sa vie, comme en témoignent ses nombreuses collaborations avec des musiciens parmi lesquels Freddy Eichelberger, organiste et claveciniste avec qui elle improvisera une lecture musicale dans la cour de la Vieille Charité.

Une rencontre avec une grande romancière d’aujourd’hui porteuse d’une indéfectible énergie littéraire, politique et vitale, qui ne cesse d’interroger les bruits du monde.


À lire

  • Nancy Huston, Arbre de l’oubli, Actes Sud, 2021.

En coréalisation avec la Ville de Marseille — Musées de Marseille.