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Archives

Enfer vert

Pedro Cesarino et Colin Niel
Rencontre animée par Sonia Déchamps et traduite du portugais

Ingénieur des eaux et forêts devenu écrivain, Colin Niel arpente depuis plus de dix ans la Guyane française, qu’il a choisie pour décor de ses romans policiers. Avec Wallace, il revient sur la question de la parentalité, de la perte et de la transmission, à travers l’histoire de Mathurine, mère célibataire, et de son fils Wallace, neuf ans. Alors que la jungle déploie ses forces invisibles, la forêt devient le théâtre d’apparitions mystérieuses, où se croisent mythes ancestraux, peurs et secrets. Colin Niel joue avec les codes du polar et du réalisme magique pour interroger la relation de l’homme à la nature et à ses propres démons.

De l’autre côté de la frontière, au Brésil, Pedro Cesarino, anthropologue et écrivain, s’inspire de ses enquêtes de terrain. Les vautours n’oublient pas mêle roman noir et voyage initiatique au cœur des communautés indiennes d’Amazonie. À travers une intrigue à suspens, il dénonce la persistance de pratiques néocoloniales, le racisme systémique et la corruption qui ravagent la région. Confronté aux fantômes du passé, son héros plonge dans l’univers du chamanisme, où mythes et réalité s’entremêlent pour révéler la violence structurelle qui frappe les peuples autochtones et leur environnement.

Lorsque des meurtres sont commis dans la jungle, la nature luxuriante peut rapidement se transformer en enfer vert. Loin d’être de bon conseil, les esprits de la forêt rappellent à chaque pas la fragilité de l’équilibre entre l’homme et son habitat…


À lire

  • Pedro Cesarino, Les vautours n’oublient pas, traduit du portugais (Brésil) par Hélène Melo, Éditions Rivages, 2025.
  • Colin Niel, Wallace, Éditions du Rouergue, 2024.

Éloge de la honte

Mathieu Simonet

De quoi avez-vous honte ? Cette question, à la fois intime et universelle, a été le point de départ d’une aventure littéraire et humaine portée par l’écrivain Mathieu Simonet. Avec le projet «Éloge de la honte», il invite depuis 2019 des centaines de personnes, adolescents et adultes, à sonder leur mémoire et à livrer, anonymement, les secrets et les souvenirs liés à ce sentiment parfois inavouable

À l’occasion du festival, trois classes monteront sur le plateau de La Criée pour partager le fruit de cette expérience collectivet. Leurs témoignages, recueillis au fil de plusieurs mois d’ateliers, composent une mosaïque sensible de récits, tour à tour drôles, poignants, libérateurs. Car la honte, loin d’être seulement un poids, peut devenir une force lorsqu’on ose la nommer et la partager. Comme le rappelle Mathieu Simonet, «on peut faire de nos hontes, de nos faiblesses, une force politique»

Sur scène, les voix des élèves se mêleront pour dire la honte, la regarder en face, la transformer en parole vivante. Un moment riche en émotions, qui nous rappelle que l’on n’est jamais seul avec ses failles – et que l’écriture, parfois, peut nous aider à les apprivoiser.

Le projet «Éloge de la honte» s’inscrit dans la lignée des dispositifs participatifs chers à Mathieu Simonet. Depuis plus de vingt ans, l’écrivain imagine des formes inédites pour inciter chacun à se sentir légitime à écrire, à raconter son histoire, à tisser du lien par la littérature. Qu’il s’agisse d’échanges de secrets entre lycéens, de récits de rêves en prison ou d’ateliers d’écriture dans les hôpitaux, son travail explore sans relâche les frontières entre l’intime et le collectif, la performance et la littérature.

Un projet mené avec le regard artistique de Maissiat.


À lire

  • Mathieu Simonet, Anne-Sarah K., Seuil, 2019.

À réécouter ou à revoir

  • De quoi avons-nous honte ?, L’été comme jamais, France Inter, émission du 20 juillet 2021.

  • TV : 28 minutes, Arte, Anne-Sarah Kertudo, émission du 12 juin 2018.

Des ruines mayas aux sommets andins

Lætitia Bianchi et Alexandre Lasheras
Rencontre animée par Sonia Déchamps

Dans Le Manège des Andes, son premier roman très réussi, Alexandre Lasheras suit le destin de trois femmes – une immigrante vénézuélienne afro-descendante, une expatriée italienne et une Colombienne – qui tentent de réinventer leur vie dans le Bogotá d’aujourd’hui. En parallèle, le rêve de Simon Bolivar de créer une Amérique latine libre et unifiée nous rappelle l’histoire de ce pays. Entre rêves de liberté et fantômes du passé, le roman tisse une fresque intime et politique au cœur de la plus vaste crise migratoire qu’ait connue ce continent.

De son côté, Laetitia Bianchi livre avec Bonampak une enquête littéraire sur la découverte d’un site maya dans le Chiapas, au Mexique, désormais livré au tourisme de masse. À travers une écriture aussi précise qu’engagée, elle démonte les récits dominants et dévoile comment les fantasmes occidentaux ont façonné la perception de ces vestiges. Interrogeant l’usage idéologique du patrimoine et la manière dont l’histoire est écrite, elle révèle les violences coloniales qui sont toujours à l’œuvre dans ce morceau de jungle mexicaine.

Entre mémoire collective et récits intimes, Alexandre Lasheras et Laetitia Bianchi nous entraînent au cœur de l’Amérique latine pour une rencontre autour des héritages coloniaux, des luttes et de la résistance des peuples.


À lire

  • Lætitia Bianchi, Bonampak, Éditions Verticales, 2025.
  • Alexandre Lasheras, Le Manège des Andes, Le Bruit du monde, 2025.

Des nouvelles des collégiens

Julien Delmaire, Sébastien Joanniez, Louise Mottier, Marc Alexandre Oho Bambe et Sigolène Vinson
Rencontre et remise du prix animées par Nicolas Lafitte

Pour la 7e saison de ce concours qui stimule l’imagination des collégiens, cinq écrivains ont chacun accompagné une classe dans l’écriture d’une nouvelle. Aucune contrainte ni thématique imposées. Une page vierge, donc, pour les collégiens ainsi que les autrices et auteurs Julien Delmaire, Sébastien Joanniez, Louise Mottier, Marc Alexandre Oho Bambe et Sigolène Vinson.
Les élèves ont plongé avec ferveur dans cette aventure collective. S’inspirant du réel ou flirtant avec la science-fiction, les élèves ont fait surgir des univers multiples qui reflètent leurs interrogations et leurs préoccupations. D’une grande qualité, ces cinq nouvelles nous plongent dans des intrigues à suspens et des ambiances qui font frissonner !

Les cinq textes ont ensuite été soumis au vote avisé de 2500 collégiens des Bouches-du-Rhône, qui en ont débattu passionnément en classe. Le palmarès sera dévoilé en direct dans la grande salle de La Criée, en présence des écrivains accompagnateurs et des jeunes auteurs qui se verront remettre le recueil imprimé des cinq nouvelles.


Projet mené en collaboration avec l’Académie d’Aix-Marseille, avec le soutien de la Drac Paca, du Conseil départemental des Bouches-du-Rhône et de la Fondation La Poste.


À lire

  • Des nouvelles des collégiens, saison 7, Oh les beaux jours !, 2025.
    Publication en accès libre sur ohlesbeauxjours.fr

Cicatrices

Maryline Desbiolles et Sylvie Tanette
Rencontre animée par Élodie Karaki

L’histoire de l’immigration – italienne, algérienne – est au cœur des romans de Maryline Desbiolles et de Sylvie Tanette, qui rappellent que les blessures nées du déracinement peuvent traverser les générations.

Dans L’Agrafe, Maryline Desbiolles donne vie à Emma Fulconis, jeune femme de l’arrière-pays niçois, farouchement libre, soudain stoppée dans son élan par une chute brutale qui l’oblige à repenser sa liberté. Ce corps qui vacille, c’est toute une histoire qui remonte : celle d’un village, d’un nom, d’un héritage porté malgré soi. Petite-fille de harkis, Emma porte en elle les traces de l’histoire collective, des non-dits et du racisme latent. À travers une langue poétique et charnelle, l’écrivaine fait entendre des voix multiples, comme un chœur ancien dans un décor contemporain. Une écriture de la sensation, de l’écho, du mouvement.

Dans Une vieille colère, Sylvie Tanette revient sur son enfance passée à Marseille, dans une famille d’origine italienne où certaines histoires n’étaient pas faites pour être racontées. Deux cousins condamnés pour meurtre, des silences à répétition, une colère qui s’installe – sourde, tenace –, qui traverse les générations et finit par chercher ses mots. Son récit, à la fois intime et lucide, mêle chronique familiale, souvenirs et digressions dans une prose tendue, qui se joue des silences, où humour et douleur ne sont jamais loin l’un de l’autre.

Entre ces deux écrivaines, un même refus de l’oubli. L’une écrit au rythme des paysages et des voix qu’elle fait affleurer ; l’autre avance par à-coups, par éclats, comme on cherche à comprendre, sans trahir. Ensemble, Maryline Desbiolles et Sylvie Tanette traceront des chemins de lecture qui parlent tout autant de solitude que de famille, des histoires qu’on garde en soi et de celles qu’il faut bien finir par dire.


À lire

  • Maryline Desbiolles, L’Agrafe, Sabine Wespieser Éditeur, 2024 (Prix littéraire Le Monde).
  • Sylvie Tanette, Une vieille colère, Les Avrils, 2024.

Effondrement immédiat

Benjamin Adam et Mathieu Larnaudie
Rencontre animée par Sonia Déchamps

Dans Trash Vortex, l’écrivain Mathieu Larnaudie orchestre une satire virtuose de la fin du monde à travers le parcours d’Eugénie Valier, magnat de l’industrie qui décide de démanteler son empire pour tenter de réparer ce qui peut l’être : nettoyer les océans de leurs déchets. Mais au-delà du geste écologique, le roman ausculte l’angoisse des élites face à l’effondrement, la complexité des rapports de pouvoir et la spirale autodestructrice d’une humanité qui transforme la planète en «trash vortex», ce continent de plastique flottant à la dérive. Mathieu Larnaudie fait tourner ses phrases comme les courants marins, brassant avec ironie enjeux politiques et relationnels.

Avec Inlandsis Inlandsis, l’auteur BD Benjamin Adam nous projette en 2046, dans une France dirigée par un régime autoritaire et une planète au bord du gouffre climatique. Deux auteurs de bande dessinée, exilés en Antarctique pour une résidence artistique, doivent survivre dans un désert glacé alors que la mémoire du monde fond sous leurs pieds. Pendant ce temps, Marie, l’initiatrice du projet, lutte contre ses propres pertes de mémoire et les bouleversements de sa vie. Cette bande dessinée d’anticipation, nourrie d’une réflexion scientifique sur la glace comme archive du vivant, entremêle fiction et documentaire pour livrer une parabole sur la crise écologique et la résistance des imaginaires.

Réunis à l’Alcazar, Mathieu Larnaudie et Benjamin Adam confrontent roman et bande dessinée pour explorer, chacun à leur manière, la catastrophe écologique et le pouvoir destructeur de l’humanité. Entre satire sociale et aventure polaire, leurs œuvres dialoguent autour de la même urgence : raconter la beauté menacée du monde et la nécessité de s’en souvenir avant qu’il ne soit trop tard.


À lire

  • Benjamin Adam, Inlandsis Inlandsis, Dargaud, 2025.
  • Mathieu Larnaudie, Trash Vortex, Actes Sud, 2024.

Désirs d’archives

Hélène Giannecchini et Cy Lecerf Maulpoix

Cy Lecerf Maulpoix et Hélène Giannecchini partagent une même passion : explorer les archives minoritaires pour faire émerger, au présent, les voix et les visages que l’histoire officielle a souvent laissés dans l’ombre. Depuis des années, ils collectent images, textes, lettres et fragments de vies, tissant des passerelles entre les États-Unis et l’Europe, à la recherche de militantes, militants, auteurs, autrices et artistes queer méconnus ou injustement oubliés.
Cette lecture, conçue comme une traversée sensible de leurs recherches respectives, mêle traductions, lectures de textes originaux, projections et permet de découvrir des fragments d’histoires comme des réflexions sur le rapport sensible et politique à l’archive.

Hélène Giannecchini est écrivaine, théoricienne de l’art et spécialiste des rapports entre texte et image. Son travail, à la croisée de la littérature, de l’histoire et de la photographie, interroge la mémoire, la transmission et la puissance politique des liens d’amitié et de solidarité au sein des communautés queer.
Auteur, traducteur, journaliste indépendant et chercheur, Cy Lecerf Maulpoix s’attache à défricher le champ de l’écologie queer en proposant de nouvelles pistes militantes et des perspectives transversales pour penser les luttes contemporaines.


À lire

  • Hélène Giannecchini, Un désir démesuré d’amitié, Éditions du Seuil, 2024.
  • Cy Lecerf Maulpoix, Écologies déviantes, Cambourakis, 2022.

Retrouvez Hélène Giannecchini le vendredi 30 mai au Conservatoire pour une rencontre avec Blandine Rinkel intitulée Choisir sa famille.

Choisir sa famille

Hélène Giannecchini et Blandine Rinkel
Rencontre animée par Élodie Karaki

Blandine Rinkel et Hélène Giannecchini interrogent la place centrale – parfois asphyxiante – de la famille dans nos existences. Toutes deux explorent ce qu’il advient lorsqu’on choisit, ou qu’on est contraint, de s’en extraire. Faille ou fugue chez Rinkel, amitié élective et mémoire queer chez Giannecchini : il s’agit toujours de déplacer les lignes, de défier l’héritage imposé, pour mieux réinventer sa manière d’habiter le monde.

Traversés par la littérature, la pensée critique et les archives personnelles, ces deux textes proposent une cartographie sensible des liens  non officiels», ceux que l’on tisse hors des cadres hétéro-familiaux traditionnels. Chez l’une, le foyer devient prison et la fuite un acte de survie ; chez l’autre, l’amitié devient lieu de résistance, force politique et récit partagé. À travers deux formes hybrides – entre essai et autobiographie – les deux autrices rendent hommage à celles et ceux
qui choisissent, par nécessité ou conviction, d’aimer, de vivre et de construire autrement.

Une rencontre pour penser ensemble la puissance subversive des attachements choisis, imaginer autrement nos relations amicales et réinventer la famille..


À lire

  • Hélène Giannecchini, Un désir démesuré d’amitié, Éditions du Seuil, 2024.
  • Blandine Rinkel, La Faille, Stock, 2025.

Retrouvez Hélène Giannecchini le samedi 31 mai à 16h au conservatoire pour une rencontre avec Cy Lecerf Maulpoix intitulée Désirs d’archives ; Blandine Rinkel pour l’Instant poésie samedi 31 mai à 16h15 à la Criée et à 21h au conservatoire pour le Kometa Comedy Club.

Bleu nuit, blouson rose

etaïnn zwer
Performance suivie d’un échange avec le public animé par Michaël Batalla
 

« tout corps assigné prend feu, / un feu qui n’a rien de la tendresse / dans un pays qui n’a rien de / baisable, moi je veux brûler / d’un soleil intérieur, je veux me / donner naissance tout e seul e »

c’est la balade de deux garçons têtus, drama queens, camarades indécises, serré e s dans un zoo, un bled qui a aussi de la tendresse mais qui pue trop la mort, alors iels passent par le trou de la serrure, parce que vivre ça claque mieux que survivre, iels s’embrassent (ou se touchent) dans presque tous les plans, leurs bouches et leurs rêves collés ensemble forment un pont qui les aide à traverser, au cours du voyage iels se transforment, lentement, puis se séparent pendant les trois-quarts du film, par amour, LA FIN est peut-être le personnage principal, aucun e comédien ne noir e ne meurt, T4T c’est trendy, la cheffe opératrice reçoit un prix, c’est lumineux (parfois), et triste (un peu), et c’est beau.

etaïnn zwer fera une lecture performée de Bleu nuit, blouson rose, un texte sur le désir et la métamorphose des corps, porté par une langue déconstruite et incandescente.

En partenariat avec le CipM.


À lire

  • etaïnn zwer, Bleu nuit, blouson rose, Éditions du commun, 2024.

Après

Raphaël Meltz et Louise Moaty

C’est l’histoire d’une disparition. D’un amour qui se brise ; du vide qui touche brutalement toute une famille. Dans Après, un roman d’une rare intensité, la mort n’est pas une fin, mais un point de vue. Lucas, père de famille fauché brutalement lors d’une sortie à vélo, devient le témoin invisible de la vie qui continue sans lui. Depuis cet entre-deux, il observe sa femme, ses enfants et leurs amis, leurs gestes, leur chagrin, la lente recomposition de l’absence. Que reste-t-il de l’amour quand tout s’effondre ? Avec une délicatesse bouleversante, Raphaël Meltz donne voix à ce qui ne se dit pas, à la douleur muette, à la tendresse qui persiste au-delà du départ.

Entre la brutalité de la perte et l’espoir têtu de ne pas tout perdre, Après explore ce territoire fragile où les vivants et les absents se frôlent encore, où l’on apprend, malgré tout, à aimer différemment. Pour faire lecture de ce texte bref et fulgurant suspendu entre deux mondes, Raphaël Meltz sera accompagné par la comédienne Louise Moaty. Ensemble, ils feront entendre la voix du disparu, la vibration de ceux qui restent, et la lumière qui subsiste, même dans la nuit du deuil.


À lire

  • Raphaël Meltz, Après, Le Tripode, 2025.