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À la rencontre de Sébastien Joanniez

Sébastien Joanniez dialogue avec ses jeunes lecteurs

Oh les beaux jours ! invite les élèves du lycée professionnel de La Viste à rencontrer Sébastien Joanniez.
Ils intervieweront eux-mêmes l’écrivain autour de son roman On a supermarché sur la lune, où Rosa, 14 ans, tient un journal intime drôle, poétique et bouleversant. Un livre qui capte avec justesse les tumultes de l’adolescence.

 


À lire

  • Sébastien Joanniez, On a supermarché sur la lune, La Joie de lire, 2022.

Tout est roman

Adrien Bosc et Baptiste Fillon
Rencontre animée par Camille Thomine

Dans son dernier livre, Adrien Bosc remonte, comme à son habitude, le fil de l’histoire. L’Invention de Tristan est un roman-enquête qui retrace le destin singulier de Tristan Egolf, écrivain américain météorique, à travers le regard de Zachary, un Américain de passage à Paris. Parti d’une légende littéraire – celle d’un jeune auteur sans le sou, rejeté par tous les éditeurs de son pays, qui trouve son salut en France grâce à une rencontre amoureuse et à l’entremise du père de sa compagne, un écrivain célèbre –, le narrateur mène l’enquête. De Paris à Lancaster (Pennsylvanie), il reconstitue le parcours de cet écrivain fulgurant, auteur du cultissime Seigneur des porcheries.

Un coup de pied dans la poussière retrace le destin de Nissan, un peintre né dans une famille juive en Ukraine au début des années 1920. Fuyant les pogroms, sa famille émigre en Galilée alors qu’il est adolescent. Tandis que ses proches s’attachent au travail de la terre, Nissan se passionne pour le dessin. À quinze ans, il est enrôlé dans les forces d’autodéfense juives et participe à des expéditions contre des paysans arabes. Révolté par la violence à laquelle il prend part, il désobéit, provoquant la rupture avec sa famille. Installé à Tel Aviv, il se consacre à la peinture et rejoint le parti communiste, qui rassemble alors Juifs et Arabes. Mais l’histoire mouvementée du 20e siècle le rattrape, bouleversant à nouveau sa trajectoire.

Deux écrivains questionnent la place de l’individu face à l’étau d’une époque, à la pression des origines et à la violence du monde. Par ailleurs scénariste, Baptiste Fillon déploie une écriture attentive à l’intime et aux arcs narratifs, tandis qu’Adrien Bosc brouille les pistes, entre documentaire et fiction.
Où commence le roman et où s’arrête l’enquête ? Deux récits passionnants, deux destins, deux manières d’inventer la littérature à partir d’histoires vraies.


À lire

  • Adrien Bosc, L’Invention de Tristan, Stock, 2025.
  • Baptiste Fillon, Un coup de pied dans la poussière, Le Bruit du monde, 2025.

Démons intérieurs

Constantin Alexandrakis et Rebecca Lighieri
Rencontre animée par Chloë Cambreling

Dans L’Hospitalité au démon, Constantin Alexandrakis s’attaque de front à l’un des tabous les plus tenaces : les violences sexuelles subies par les hommes. À travers la figure d’un père bouleversé par le surgissement d’un passé traumatique — celui d’attouchements subis dans l’enfance — il livre un roman sidérant, à la fois intime et politique. Fulgurant, parfois dérangeant, ce texte tente de «cartographier le Grand Continent des Violences Sexuelles» sans céder ni au pathos ni aux simplifications. Loin d’un récit de pure confession, Constantin Alexandrakis interroge la peur de la reproduction des schémas de violence, la confusion des héritages, et le pouvoir de la littérature comme lieu de mise à distance. Préfacé par Neige Sinno, son livre s’impose comme un geste littéraire fort, au croisement de l’autofiction, de l’essai philosophique et de l’écrit expérimental.

Rebecca Lighieri poursuit dans Le Club des enfants perdus sa saisissante exploration des enfances fracassées. Cette fois, c’est Miranda, jeune fille hypersensible et visionnaire, qui tente de survivre à un monde adulte incapable de la comprendre — père acteur narcissique, mère absente, société aveugle aux tourments adolescents. Entre fantastique et réalisme cru, hallucinations et dérive toxique, le roman dresse le portrait d’une génération submergée par l’émotion, en mal de refuge, en quête d’un langage pour dire l’angoisse. Le réalisme y côtoie le fantastique, la pop culture croise Shakespeare, et la douleur devient, elle aussi, matière d’écriture.

Deux romans puissants, hantés par des figures d’enfants perdus, marqués par des corps en crise et des familles en délitement. Deux écritures qui, chacune à leur manière, sondent les marges de l’intime pour faire émerger une parole neuve, affranchie des normes. Rebecca Lighieri ne s’y est pas trompée : lectrice enthousiaste de L’Hospitalité au démon, elle a vu dans le livre de Constantin Alexandrakis une œuvre «magistrale».


À lire

  • Constantin Alexandrakis, L’Hospitalité au démon, Éditions Verticales, 2025.
  • Rebecca Lighieri, Le Club des enfants perdus, Éditions P.O.L, 2024.


Retrouvez Constantin Alexandrakis le samedi 31 mai à l’Alcazar lors des Rencontres de la NRF et Rebecca Lighieri (Emmanuelle Bayamack-Tam) le jeudi 29 mai à La Criée lors de la soirée La Nuit Mylène. Tout est chaos ?

Les enfants du silence

Claude Ardid et Jessica Martin (François Beaune)
Rencontre animée par Claire Mayot

Dans La Profondeur de l’eau, François Beaune, sous le pseudonyme de Jessica Martin, donne voix à une femme marquée par une enfance fracassée : maltraitance, mort d’un petit frère, errance de foyers en familles d’accueil au gré des décisions de l’Aide sociale à l’enfance. L’écrivain confronte avec justesse le récit intime et la froideur administrative, révélant la violence systémique et l’aveuglement d’une société qui ne sait pas protéger ses enfants. Né d’une histoire vraie, ce livre est loin d’être un simple récit documentaire, c’est une œuvre littéraire puissante qui fait émerger une voix, où le motif aquatique devient le fil rouge d’une reconstruction fragile. La recherche de justesse y prime sur la vérité brute.

Claude Ardid a mené une enquête implacable au cœur de l’Aide sociale à l’enfance. Pendant dix-huit mois, le journaliste a sillonné la France pour recueillir les témoignages d’enfants brisés, de familles démunies, d’éducateurs épuisés et de magistrats impuissants. Son constat est glaçant : suicides d’adolescents, prostitution de mineurs dans les foyers, violences ignorées, mineurs livrés à eux-mêmes… Il révèle l’ampleur d’un scandale d’État et la faillite d’un système censé protéger les plus vulnérables. Mais il donne aussi la parole à celles et ceux qui résistent, refusant de baisser les bras face à la machine à fabriquer du malheur.

L’un par la littérature, l’autre par l’enquête journalistique, François Beaune et Claude Ardid révèlent la même urgence : dire l’indicible et rappeler que derrière chaque dossier, chaque statistique, il y a une vie. À l’heure où la protection de l’enfance fait l’objet d’un débat public brûlant, leur dialogue nous invite à repenser collectivement notre responsabilité envers les plus fragiles.


À lire

  • Claude Ardid, La fabrique du malheur, Éditions de L’Observatoire, 2025.
  • Jessica Martin (François Beaune), La Profondeur de l’eau, Albin Michel, 2025.

D’ombre et de lumière

René Frégni et Joris Giovannetti
Rencontre animée par Amaury Chardeau

Avec Ceux que la nuit choisit, Joris Giovannetti signe un premier roman d’une intensité rare, dans lequel la Corse contemporaine devient le théâtre d’une jeunesse en équilibre précaire. Entre fidélité aux racines et désir d’émancipation, ses personnages, deux frères étudiants à Corte, affrontent la violence sociale, l’ombre du nationalisme, les blessures du cœur et du passé. Giovannetti capte les silences de l’île, ses colères sourdes, et interroge ce qui, dans l’héritage, se transmet ou s’empoisonne. À la fois roman d’apprentissage et fresque sociale, ce premier texte, salué par Jérôme Ferrari, impressionne par sa lucidité .

René Frégni, quant à lui, trace depuis plus de trente ans une œuvre sensible et puissante, où l’écriture devient une manière de survivre, de dire les fêlures et la beauté du monde. Dans Déserter , récit d’entretiens, il revient sur sa vie de fugues et de refus : désertion scolaire, militaire, sociale, pour mieux rejoindre l’essentiel — les mots, la liberté, l’errance, les rencontres qui sauvent. L’écrivain évoque Marseille, la prison, la Corse, ses maîtres (Camus, Genet, Giono) et son amour inébranlable pour les invisibles, les cabossés, les vivants debout malgré tout.

Refus des assignations, enracinement, regard ancré dans le tourment des hommes, mais aussi capacité de l’écriture à transformer la nuit en lumière : autant de lignes communes entre ces deux écrivains, de générations différentes mais animés d’un même élan.
Avec la générosité qu’on lui connaît, René Frégni reconnaît dans le premier roman de Joris Giovannetti une urgence authentique. Cette filiation littéraire donne à cette rencontre une résonance particulière, placée sous le signe de la transmission.


À lire

  • René Frégni, Déserter, Entretiens avec Fabrice Lardreau, Arthaud, 2024.
  • Joris Giovannetti, Ceux que la nuit choisit, Denoël, 2025.

Vagabondages

Marco Lodoli et Sylvain Prudhomme
Rencontre animée par Amaury Chardeau et traduite de l’italien par Valentine Leÿs

« Tu n’as jamais lu de Lodoli.
J’ai dit non. Un non piteux.
Elle a pris un malin plaisir à m’accabler, à m’affirmer que Lodoli était un des meilleurs écrivains italiens vivants, un des meilleurs écrivains vivants tout court. Que je devais impérativement lire Lodoli. Que ma vie en serait changée ».

Ces mots sont ceux du narrateur du roman de Sylvain Prudhomme, Par les routes. Ils témoignent de l’admiration que voue l’écrivain français à son homologue italien, et qu’il va pouvoir exprimer en direct durant le festival.

Marco Lodoli publie régulièrement depuis trente ans des livres emplis de poésie, qui explorent la fragilité humaine, parlent de « la vie qui passe » et du « temps qui s’en va ». Son œuvre, d’une grande délicatesse, s’attache à des personnages souvent marginaux ou anonymes – religieuses, domestiques, concierges… – dont il révèle la dignité secrète dans la banalité du quotidien. Marco Lodoli excelle dans l’art du détail, la capacité à faire surgir le mystère et la beauté au cœur des existences les plus modestes, souvent à Rome, sa ville natale, qu’il explore loin des clichés touristiques. À travers ses récits, il interroge la possibilité de l’amour, la mélancolie, la recherche d’un apaisement intérieur, tout en maintenant des tensions narratives.

Cette sensibilité à la fragilité du monde, ce regard tendre et lucide sur les vies ordinaires, font écho à l’œuvre de Sylvain Prudhomme, lui aussi attentif aux trajectoires discrètes, aux êtres en marge, à la traversée des paysages. La rencontre entre ces deux «vagabonds de la littérature», qu’Oh les beaux jours ! est heureux de réunir, promet d’être un moment fort, où l’art du récit devient une façon de célébrer la force des liens invisibles qui témoignent de notre commune appartenance au monde.


À lire

  • Sylvain Prudhomme, Par les routes, L’Arbalète/Gallimard, 2019 (Prix Femina).
  • Marco Lodoli, Si peu, traduit de l’italien par Louise Boudonnat, Éditions P.O.L, 2024.
    Et tous les autres romans de Marco Lodoli, traduits en français, publiés aux éditions P.O.L.

Retrouvez Sylvain Prudhomme pour la lecture musicale de son dernier livre, Coyote, samedi 31 mai à 19h, au conservatoire Pierre Barbizet.

Une femme sur le fil – Rencontre

Petit déjeuner-rencontre avec Olivia Rosenthal et ses lecteurs

Après sa lecture marathon de quatre heures la veille, Olivia Rosenthal partagera un petit déjeuner dominical avec ses lecteurs. Un moment privilégié pour entrer dans la profondeur de son roman Une femme sur le fil.
Un temps d’échange autour de cette traversée littéraire : questionner, approfondir et, qui sait, tirer ensemble d’autres fils de cet ample récit.


À lire

  • Olivia Rosenthal, Une femme sur le fil, Éditions Verticales, 2025.

 

Retrouvez Olivia Rosenthal le samedi 31 à 18h30 au Conservatoire pour la lecture marathon de 4h d’Une femme sur le fil.

Un cri de liberté

Najat El Hachmi et Delphine Minoui
Rencontre animée par Amaury Chardeau

Dans Lundi, ils nous aimeront – qui a reçu le prestigieux prix Nadal, souvent qualifié de Goncourt espagnol – Najat El Hachmi nous plonge dans la banlieue de Barcelone à la fin des années 1990. Deux adolescentes d’origine marocaine y tentent de s’extraire des carcans patriarcaux et culturels qui enserrent leur quotidien. L’une, fougueuse, entraîne l’autre dans un mouvement de libération intime et collectif. À travers leur amitié se dessinent de nouveaux territoires de désir et de parole. L’écriture, chez Najat El Hachmi, devient un espace de résistance et un outil d’émancipation.

Avec Badjens – littéralement «mauvais genre» en persan – Delphine Minoui donne voix à une adolescente iranienne. Nous sommes à Chiraz, en 2022, au cœur du soulèvement «Femme, Vie, Liberté». La jeune héroïne, 16 ans, monte sur une benne à ordures pour brûler son voile, dans un geste de défi aussi intime que politique. À travers un monologue intérieur brûlant d’émotion et de lucidité, elle remonte le fil de sa vie : une enfance marquée par la violence d’un père autoritaire, les désirs contrariés de son corps, les chansons qui la galvanisent, les complicités adolescentes, les premiers émois amoureux. Le surnom que sa mère lui a donné, Badjens, se révèle prophétique : il porte en germe son insoumission.

Rencontre entre deux écrivaines qui explorent la manière dont les corps féminins peuvent résister à l’effacement. Comment, malgré les murs dressés – ceux de la famille, du pouvoir, des traditions – l’envie d’aimer librement, de vivre pleinement, continue de frayer son chemin. Et comment l’écriture, toujours, trace une brèche.

En coréalisation avec le Mucem.


À lire

  • Najat El Hachmi, Lundi, ils nous aimeront, traduit du catalan par Dominique Blanc, Éditions Verdier, 2025.
  • Delphine Minoui, Badjens, Seuil, 2024.

 

Sembène 2.0, l’aîné des anciens

Renaud Boukh, Anaïs Enon, Julie Rousse et Kalidou Sy
Rencontre animée par Claire Mayot

Figure incontournable du cinéma et de la littérature africaine, l’artiste sénégalais Ousmane Sembène (1923-2007) a marqué son époque par son œuvre visionnaire et anticolonialiste. Arrivé clandestinement à Marseille en 1946, il y travaille comme docker, une expérience qui marquera profondément son engagement social et politique, mais aussi culturel. Une vie intense, faite de luttes contre les injustices sociales et les préjugés raciaux, que racontent Anaïs Enon et Julie Rousse dans un passionnant podcast documentaire qu’elles présenteront en compagnie de Renaud Boukh – qui a réédité Le Docker noir, l’un des romans phares de Sembène – et de Kalidou Sy, chercheur, qui interviendra depuis Saint-Louis du Sénégal.

Cette discussion sera précédée par une lecture d’extraits de textes de Sembène lus et mixés avec les sons de Marseille et du Sénégal, performée en direct par les deux autrices du podcast.

En partenariat avec le musée d’Histoire de Marseille et Radio Grenouille.


Cette rencontre est suivie d’une écoute de podcast dans le site archéologique du Port antique en plein air, à partir de 19h.


À lire

  • Ousmane Sembène, Le Docker noir, Éditions Héliotropismes, 2023.

À écouter

  • Le podcast Sembène 2.0., l’aîné des anciens.

 

Points de bascule

Cati Baur et Constance Joly
Rencontre animée par Sonia Déchamps

Marcie, la BD de Caty Baur, nous entraîne dans le quotidien de Caroline, fraîchement licenciée à l’approche de la cinquantaine et confrontée à la périménopause. Devenue presque invisible aux yeux de la société, elle décide pourtant de transformer cette discrétion en force. La voilà qui se réinvente en détective privée, jusqu’à New York, renouant ainsi avec son identité profonde, Marcie Bangor. Avec une fantaisie n’excluant jamais la justesse, Cati Baur signe une BD feel-good au trait coloré et aux dialogues savoureux, qui détourne malicieusement les codes du genre pour aborder ce moment de bascule féminin.

Dans Reverdir, Constance Joly suit elle aussi le parcours d’une femme de cinquante ans prise dans la tourmente : sa mère s’efface dans l’Alzheimer, son mariage s’effondre, sa fille s’apprête à quitter la maison. Entre pertes et renoncements, le roman explore la possibilité de « reverdir », de renaître à soi-même au fil des épreuves, des rencontres et de nouveaux désirs. Avec une lucidité joyeuse, Constance Joly donne chair à la fragilité, interrogeant la reconstruction de soi à l’âge mûr et la capacité à aimer encore, malgré tout.

Deux héroïnes inoubliables qui, au cœur de la tourmente, refusent de disparaître et célèbrent la vitalité de celles qu’on croit effacées. Dans un monde qui valorise la jeunesse et l’apparence, BD et roman résonnent ici comme une ode à la liberté de se réinventer, à l’humour salvateur et à la puissance de la solidarité féminine.


À lire

  • Cati Baur, Marcie, Dargaud, 2025.
  • Constance Joly, Reverdir, Flammarion, 2025.