La petite bibliothèque de Christophe Ono-dit-Biot

Durant le festival, nous avons interrogé les autrices et auteurs invités sur une petite bibliothèque idéale. Rencontre avec Christophe Ono-dit-Biot qui a publié Mer intérieure aux Éditions de l’Observatoire en 2025.
Quelle œuvre vous évoque la mer ?
Un poème d’Apollinaire, l’un des plus plus courts de la littérature française, dans le recueil Alcools, qui s’appelle Chantre :
Et l’unique cordeau des trompettes marines
Quelle œuvre vous évoque le soleil et la chaleur ?
L’été ou Noces de Camus.
Quel livre êtes-vous la seule à connaître ?
C’est un livre sur la mer, Une jeune fille nue de Nikos Athanassiadis, préfacé par Jacques Lacarrière. Je l’ai trouvé dans une pension en Grèce et je suis sûr que c’est une source d’inspiration du Grand bleu, en dehors de Jacques Maillol. C’est l’histoire d’un jeune grec qui doit se marier et qui en a marre, et devient très misanthrope. Il quitte tout et part s’installer à la pointe d’une île à Mytilène. Il rencontre un pêcheur. Sa fille se baigne nue et est en contact avec un dauphin un peu mythique, on ne sait pas trop s’il existe. Il aurait connaissance des grands secrets de la mer. C’est un des plus beaux livres que j’ai lu sur le rapport du corps à l’eau, l’érotique et la sensualité de la mer et la connexion qu’elle offre avec les grands mythes de la mer Égée.
Quel est votre personnage préféré ?
Le capitaine Nemo, pour une raison très simple car c’est un misanthrope généreux. Il l’est devenu pour une raison compréhensible, on a tué sa femme et son enfant. Il y a un passage où se dispute avec le harponneur Ned et parle des baleines. C’est le premier à alerter sur la surpêche.
— Eh ! bien, monsieur, demanda le Canadien, ne pourrais-je leur donner la chasse, ne fût-ce que pour ne pas oublier mon ancien métier de harponneur ?
— À quoi bon, répondit le capitaine Nemo, chasser uniquement pour détruire ! Nous n’avons que faire d’huile de baleine à bord.
— Cependant, monsieur, reprit le Canadien, dans la mer Rouge, vous nous avez autorisés à poursuivre un dugong !
— Il s’agissait alors de procurer de la viande fraîche à mon équipage. Ici, ce serait tuer pour tuer. Je sais bien que c’est un privilège réservé à l’homme, mais je n’admets pas ces passe-temps meurtriers. En détruisant la baleine australe comme la baleine franche, êtres inoffensifs et bons, vos pareils, maître Land, commettent une action blâmable. C’est ainsi qu’ils ont déjà dépeuplé toute la baie de Baffin, et qu’ils anéantiront une classe d’animaux utiles. Laissez donc tranquilles ces malheureux cétacés. Ils ont bien assez de leurs ennemis naturels, les cachalots, les espadons et les scies, sans que vous vous en mêliez. *
Et nous en sommes là aujourd’hui sur les baleines, les requins…
Il y a Ulysse aussi, parce que c’est un personnage qui sait toujours comment se sortir d’une situation. Son animal préféré est le poulpe, qui est l’animal de la mètis, ce mot grec pour dire l’intelligence pratique, l’espièglerie presque. Le poulpe est l’animal qui peut entrer partout pourvu que son œil passe.
* Jules Verne, Vingt mille lieues sous les mers / Partie 2 / Chapitre 12