Avec Yves Pagès et Philippe Bretelle.
« Une autre fin du monde est possible », « L’homme descend du songe », « Dieu existe-t-elle ? »… On dit des murs qu’ils ont des oreilles, mais sait-on qu’ils murmurent ? Dans Tiens, ils ont repeint ! (La Découverte, 2017), l’écrivain et éditeur Yves Pagès compile près de 4 000 graffitis urbains collectés dans le monde entier durant les cinquante dernières années. Une mémoire de la joie virale du bon mot, de l’énergie politique gratuite, de l’audace minuscule, de la poésie mineure et éphémère, des marges de la syntaxe, de l’invention maladroite, du plaisir de l’inachevé. Des mots qui, inscrits là sans destination ni droit de cité, sont livrés à tous les regards et « contaminent » l’espace public, troublant ainsi l’ordre du discours.
Trouble à l’ordre, graff, et amour du bon mot, sont aussi au coeur du dernier roman d’Yves Pagès, Encore heureux (L’Olivier, 2018). On y suit la cavale de Bruno Lescot, indiscipliné chronique, adepte du pochoir ironique, qui a passé sa jeunesse à collectionner les délits jusqu’à son dernier exploit, ce vrai-faux braquage qui a coûté la vie à un policier. Une traversée de la France des années 1970-80 entre gauche mitterrandienne, gang des Postiches et rêve collectif d’un « no future ».
Issue d’un montage de textes empruntant à Tiens ils ont repeint ! et Encore heureux, cette lecture d’Yves Pagès redonne voix et couleurs aux graffitis, aphorismes urbains et slogans politico-poétiques qui ont fleuri dans nos villes depuis Mai 68 et qui, aujourd’hui, vont recouvrir les murs des Rotatives lors d’une performance réalisée en direct par son complice de longue date, le graphiste Philippe Bretelle.
À lire : Yves Pagès, Tiens ils ont repeint !, La Découverte, 2017.
Yves Pagès, Encore heureux, L’Olivier, 2018.
Lecture créée au festival Hors Limites Seine-Saint-Denis en mars 2018.